30 mai 2012
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Conrad Aiken (1889-1973)
Dissonants
Cléopâtre gît morte dans un panier de cristal
enroulée et embaumée par les plus expertes mains.
Un collier d'or a été lacé autour de sa nuque,
et ses tatbebs sont, parait-il, usés par le sable.
Cléopâtre défunte fut autrefois révérée en Egypte -
elle avait l'oeil tendre, Princesse du sud.
A présent, elle est très vieille et sèche, presque effacée,
avec du bitume noir on a scellé sa bouche .
Les pilleurs de tombe ont arraché les anneaux d'or de ses doigts,
bravant le symbole sacré en diagonale sur son sein.
Ils ont apeuré les chauve souris qui tournoyaient calmement au dessus d'elle.
Pauvre Dame ! Elle aurait été au repos depuis bien longtemps
S'elle n'avait pas été enroulée et embaumée si finement,
préservée, obscène, pour moquer les vols noirs des ans.
Qu'est ce que son amant aurait dit, l'ayant présagé ?
Eût il été ému jusqu'à l'extase, jusqu'aux larmes ?
O Terre propre et douce de laquelle la verte lame provient !
Quand nous mourrons, mon adoré et Moi,
fermes toi bien dessus nous, que nous puissons à jamais reposer,
envoyant herbe et fleurs jusqu'au ciel.
traduit de l'américain par E. Dupas