Octavio Paz (1914-1998)
Jardin
Nuages à la dérive, continents
somnanbules, pays sans substance
ni poids, géorgraphies dessinées
par le soleil et effacées par le vent.
Quatre murs de brique. Des bougainvilliers :
dans leurs flammes pacifiques mes yeux
se baignent. Le vent passe entre des louages
de feuillage et des herbes à genoux.
L'héliotrope à pas doux se croise
enveloppé dans son ârome. Il y a un prophète :
le frène- et un pensif : le pin.
Le jardin est petit, le ciel immense.
Verdeur survivante dans mes décombres :
par mes yeux tu te contemples et te touches
tu te connais en moi et en moi te penses,
en moi tu dures et en moi tu disparais.