Romance de Maubeuge
par un mai médiocre maladif d’averses
Je traînais mes bateaux sur la mer de pavés du centre ville
Sans parapluie avec le mépris de la foule claquant au vent
L’orgueilleux pavillon de mon coeur
pourtant sans faits d’armes majeurs
dans quel naufrage oiseux Vagabondais je
il fallait demander au vent moi je n’avais
Prise sur rien je n’étais qu’une voile molle et solitaire
j’attendais la bourrasque que mon odyssée se mette en branle voilà tout
sitôt dit sitôt advenue il suffisait de garder les yeux ouverts
de se laisser faire comme d’habitude
l’halo l’annonçait à des mètres à la ronde rue du parc
la femelle des femelles la médusante l’inespérée
La divine tigresse de Busan au milieu
De la cohue laide et insane qu’on croise toujours le samedi
à croire que l’humanité ne sait grouiller que ce jour là
Incroyable silhouette coréenne quel fabuleux tour du hasard
Te faisait marcher devant moi sous la pluie de l’inqualifiable Maubeuge
Tes yeux bridés débridant tout sur leur passage
ton visage taillé à la serpe de la grâce
et ce félin déhanchement que renforçait ta jupe
Je te vis je te voulais et dans l’épiderme
L’agitation moléculaire semblable à celle que Tristan pour Iseult …
Mais ne nous racontons pas d’histoire Il pleuvait c’est tout
je me disais qu’elle serait peut être celle qui
irradierait comme jamais mon obscure chambre d’étudiant
Que je me frayerai peut être à travers des forêts de malentendus
un chemin vers son cœur…
Je voulais surtout être happé dans la géographie de sa peau
Panse contre panse sein contre sein feulant dessus moi
Alors je me suis avancé et je t’ai parlé
Dieu merci je savais de l’anglais et des bribes de coréen
Mais mais il apparut que tu n’avais pas de temps à consacrer
A un parasite sensuel comme moi-même polyglotte même atypique parce
Que des pasteurs là bas dans ta péninsule
Avaient précocement apprivoisé ta beauté t’avaient inoculé
Avec la seringue des pires bibles protestantes le gout de la sainteté
Tu n’étais plus un mammifère qui fait l’amour c’était bien fini
Des salauds célestes avaient javellisé le pain de ton corps once and for all
« i want to be like a character from the Bible »
“everybody is a living sculpture” disais tu
Et tu me fis comprendre que
Ton cul était la chasse gardée du Christ
tu préférais t’occuper d’orphelins burkinabés
Là bas dans les chaleurs infernales de Ouagadougou quitte à t’y incendier la nuque
que cajoler la libido d’un petit français ici
Et ce faisant tu as déchiré ma voile de tes griffes protestantes
Tu as retourné tous les ongles de mon appétit sexuel
Tu m’as glacé comme l’hiver la Sambre parfois
Tu m’as barbouillé de honte animale
Tu m’as fait un grand trou dans la poitrine
Tu m’as éliminé et tu es passée
Je te laissais continuer ton chemin vers
Ta banquise de pureté
ma voile promptement recousue l’odyssée m’emmena
ailleurs toujours imprévisible n’importe quoi
Mais tout de même panse contre panse sein contre sein feulant dessus moi
Quel genre de nuit pouvait offrir ton sublime pelage ?