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29 avril 2012 7 29 /04 /avril /2012 15:56

 

koulsy-lakmo.jpg

 

Koulsy Lakmo (1959 - ), poète tchadien

 

 

Il y a un Dieu qui s'adore

 

 

Il y a un Dieu qui s'adore

sans chapelet

sans tapis

sans rosaire

sans Est Ouest

sans bouilloire à ablution

sans hostie

sans encensoir

sans se cogner le front au sol

sans s'user le genou au presbytère

sans chiromancie

sans croix

sans croissant

sans amulette

sans margay

sans transe

sans verset

sans sourate

sans livre

sans epître

sans bois sacré...

 

Il y a un Dieu qui s'adore

en versant le sang de l'Homme

à petites gouttes dans les pipe-lines

C'est le Dieu Pétrole

 

Ne me bénissez moi O Dieu Pétrole

parce que  j'aime pécher contre vous

parce que moi je suis hérétique

et pour couronner le tout

prenez mon sang qui coule à gros bouillons

puisque vous avez déjà accepté

le sacrifice de ma liberté

 

 

 

 

 

 

 

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28 avril 2012 6 28 /04 /avril /2012 12:48

 

kwesibrew

 

 

Kwesi Brew (1928-2007), poète ghanéen

 

 

Rire qui s'estompe

 


Tout n'est pas que rire, tout le temps.
Qui peut rire quand le toit fuit
et les murs cèdent aux inondations ?
Le rire est un assaisonnement de sel, et
le sel n'est pas nourriture, mais assaisonnement de nourriture.


Ils ont leur tristesses, ces hommes de la terre,
la pauvreté les guettes d'heure en heure
et le kenté (pagne ghanéen traditionnel) n'est qu'un éclair dans leurs vies :
transmis par les échelons des années
de l'oncle au neveu par le flux de la mère.
Les temps dentent les doigts, ont par la ruse
déserré les fils
où le tisseur de Bonwire (village ghanéen célèbre pour la confection des kentés)
avait joint
les bandes de tissus.
Les colorants de rouge, bleu, or et vert
sapés par la diablerie de l'âge,
ont pâli au point de ne plus pouvoir s'estomper.
Mais pour eux, il n'est pas question de douleur :
la vie a d'autres cadeaux. 

 

 

traduit de l'anglais par E. Dupas


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27 avril 2012 5 27 /04 /avril /2012 19:49

 

kwesibrew

 

 

Kwesi Brew (1928-2007), poète ghanéen

 

 

 Les bidonvilles de Nima

 


 En passant devant mes fenêtres, hier
Je passais devant une nuit beurée
d'étoiles semblables aux  pétales jaunes
  de l'acacia,  tombées sur la glèbe noire

où l'arbuste se campe .

 
J'ai plongé dans toute une traîtrise de ruelles tortueuses
Dans une éclipse du soleil.
J'ai entendu des murmures et des gémissements d' accouchement
sans pouvoir dire
de quelle porte détraquée ils pouvaient provenir :
Les portes étaient trop resserrées les unes contre les autres.
 

 

Trois voisins se sont rencontrés,
et après un haletant "reposez vous"
les deux jeunes hommes s'écartèrent pour
laisser passer le vieillard, puis reprirent leur chemin
dans la direction opposée vers la ruelle
sur la gauche.
C'était deux voleurs qui pillaient avec violence
mais ils s'écartaient encore devant ce vieillard
qui les remerciait.

Dans un monde endeuilllé les questions, les commentaires
tombent dans des oreilles qui n'entendent pas.
Seul le silence, la compréhension et
l'appartenance peuvent placer
le bâton d'un aveugle dans les mains
de celui qui cherche dans cette nuit.

Les murs croulants ont reposé
sur leurs poitrines pendant des décennies !
le poids de la respiration a déchiqueté
leurs poumons, et leurs yeux brûlent
avec la fumée des lampes d'osier.
Et nous nous tenons maintenant tous au bord
d'un abîme
apeurés d'y plonger tête la première, ou de
retourner dans les ténèbres de la nuit avec eux !!

 

 

traduit de l'anglais par E. Dupas

 

 

 

 

 


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2 avril 2012 1 02 /04 /avril /2012 14:45

 

kwesibrew.jpg

 

Kwesi Brew (1928-2007), poète du Ghana

 

 

Les mailles du filet

 

Nous sommes arrivés à la croisée des chemins

et je dois désormais partir ou venir avec toi.

je m'attarde à choisir

mais dans l'obscurité de mes doutes

tu as levé la lampe de l'amour

et j'ai vu sur ton visage

la route que je devais prendre.

 

 

traduit de l'anglais par E.Dupas

 

 


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3 mars 2012 6 03 /03 /mars /2012 00:09

niyiosundarecopy

 

Niyi Osundare (1947-), poète nigérian

 

L'avez vous vue

 

L'avez vous vue celle

qui a ouvert ma poitrine

et pris mon coeur

 

elle

d'yeux merveilleux

et d'appâts bondissants

 

dont la voix est plus douce

que le son

des eaux riantes

 

dont l'esprit est 

aussi aiguisé

qu'un proverbe fraîchement rôdé

 

 

traduit de l'anglais par E. Dupas

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26 février 2012 7 26 /02 /février /2012 16:57

maxamed.jpg

 

 

Maxamed Xaashi Dhamac Gaarriye (1949-), poète somalien

 

 

Kudu (Conte)

 

 

kudu.jpg

 


Quand j'étais enfant,
mon père m'a raconté une histoire, une après midi.
Nous nous étions installés
à l'ombre d'un arbre
et il commença son récit :

"Il y a bien des saisons humides,
vivait ici un roi
sur le crâne duquel poussèrent des cornes.
Ce n'était au début que des bourgeons,
, mais il les examinait chaque jour et prit peur.
Il décida que personne ne devait le savoir.
Il se mit donc à porter un large turban pour cacher
cette souillure, pour cacher cette marque honteuse.

Mais un roi, bien sûr, ne se lave pas les cheveux lui même
Un des serviteurs découvrit le secret du roi,
et jour après jour cette connaissance grandit
en lui et le rongea ; une parole devait être dite,
un terrible secret devait être divulgué.

Le serviteur voulut révéler l'affaire mais tous lui dirent :
tu te trompes.
Il répondit : non.

Ils dirent : les morts gardent bien les secrets. Il se pourrait qu'on t'égorge,
si tu insistes...

Ainsi le danger se tourna vers lui, car il lui fut interdit de parler.

Il y avait des gens, il le savait, qui se repaîtreraient d'une telle nouvelle,
mais son pain quotidien restait coincé dans sa gorge.
Il y avait des gens, il le savait, qui rêvaient d'une telle nouvelle,
et il dormait sur des charbons ardents.

Alors, une nuit, n'en pouvant plus,
Il quitta sa demeure, s'enfuit du village, et marcha
kilomètre après kilomètre dans un torrent de ténèbres.
Il erra jusqu aux buissons, jusqu'aux mares; dans la pénombre,
l'aigle prit son envol, et la douce gazelle s'enfuit.
Il s'assit auprès de l'eau
et pensa : " Il fut un temps où de telles choses
pouvaient être dites ouvertement. Oui, il fut un temps
où même au plus pauvre on pouvait dire la vérité."

Quand la lumière du jour vint illuminer les arbres, il creusa
un trou sous un arbre, avec ses mains, profondément,
comme une bête creuse un terrier
et plaça sa bouche dans le trou qu'il avait creusé
il murmura son terrible secret à la terre :
"Le Roi Gooja, le Roi Gooja a des cornes.
Des cornes comme celles du Kudu. Le roi a des cornes !"

Ne m'interrompt pas, dit mon père.
Ne me demande pas s'il te plait ce que veulent dire ces choses là.
Ce n'est qu'une histoire que j'ai hérité de mon père,
et qu'il a hérité du sien.
Veux tu savoir comment l'histoire se termina ?
Alors écoute : Quand l'homme eut raconté son histoire à la terre,
le fardeau lui tomba des épaules, et il se sentit léger.
il dépoussièra ses loques, se remit en marche s'éloigna.

Et voici le point le plus étrange de l'histoire :

Aujourd'hui encore, quand la douce pluie tombe sur cet endroit près des buissons,
l'endroit exact où le serviteur avait enterré son secret,
des cornes de Kudu émergent du sol.

 

 

Traduit de l'anglais par E. Dupas

 


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22 février 2012 3 22 /02 /février /2012 17:43

 

alhadi_adam_sudanese.jpg

 

 

Elhadi Adam Elhadi (1927- 2006), poète soudanais.

 

 

Je ne disparaitrai pas

 

 

Que se passerait-il si ma vie prenait fin
et mon coeur cessait de battre,
avec mon âme volant
à travers les cieux comme un aigle ?
Pensez vous que la vie poursuivrait son agitation
avec toute la perfection -que j'ai connu- de son système,
Ou qu'un désastre viendrait frapper le globe et l'emporter en un instant ?

Non, rien;  mais le monde sera plein
de plaisirs et de toutes formes de tentation.
Beaucoup continueront à jouer,
à attendre la venue de l'aube,
à répéter à haute voix la mélodie,
à raconter le matin aux fleurs.
et mon vrai frère
gardera le souvenir de moi,
pérennisant notre vieille amitié.

Je sais ce qui se dira demain.
Et je ridiculiserai ces propos depuis ma tombe.
Ils diront -quand je mourrai- :  son décès
a rendu heureux le président, et lui a donné la vie !

 


  Traduction de l'anglais par E. Dupas

 


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